La pénurie d’eau dans des villages ne facilite pas la tâche aux femmes et filles en période de menstruation ; des astuces vont de l’utilisation des matériaux jetable malgré les moyens limités, à séchage des serviettes non-lavées en passant par celles simplement mouillées.
Depuis sa rentrée académique dans une université publique au Cameroun, Prisca, nouvelle étudiante s’émerveille devant les installations de son désormais environnement qui lui offre des commodités. Contrairement à ce qu’elle considère comme un eldorado, Prisca, aujourd’hui âgée de 18 ans, a connu des moments de stress et d’angoisse depuis l’âge de 11 ans, lorsqu’elle entrait en sixième dans le lycée de son village. « Je suis très soulagée car j’ai vécu un calvaire au cours des sept dernières années de ma vie. L’eau est rare ; c’est parfois difficile de trouver la quantité qui peut t’aider à prendre un bain complet. Et ceci pendant des longs mois de sécheresse. A l’heure-là les filles ne sont pas différentes des hommes », lâche-t-elle en riant. Et de reprendre : « Les choses se compliquent alors lorsqu’une fille a ses menstrues. Dans un milieu où les revenus sont très limités. Difficile de laver les garnitures lavables que plusieurs d’entre nous utilisaient. Quand tu trouvais un peu d’eau, tu les mouillais parfois sans savon (un autre gros défi) et tu mettais au soleil. Certaines les séchaient sans même y verser la moindre goutte d’eau », raconte Prisca. Elle se souvient des amitiés que certaines de ses camarades tissaient avec des filles financièrement aisées pour les aider de temps en temps avec quelques serviettes jetables quand c’est possible.
Les perturbations de la gestion de l’hygiène menstruelle par les changements climatiques semblent passer inaperçues dans la liste des difficultés que rencontrent les jeunes filles et les femmes des milieux démunis. Pourtant : « Même pendant la saison des pluies les sources et les puits encaissent beaucoup de boue et l’eau, bien que disponible, n’est pas de bonne qualité. Dans mon entourage, beaucoup de jeunes filles se plaignaient des douleurs pendant la période des règles. Moi, je pense que ces règles douloureuses ont aussi un lien avec les conditions dans lesquelles nous gérons nos menstrues », indique Prisca.
Dans son ancien établissement, une enseignante révèle qu’elle a dû demander la programmation de ses heures de cours en matinée. « J’avais remarqué que les après-midis je pouvais m’évanouir à cause des odeurs qui se dégageaient dans la salle de classe surtout lorsqu’il faisait chaud. Aux chaussures et chaussettes non nettoyées des garçons, se mêlait l’odeur des jeunes filles qui étaient en période de menstrues et qui ne pouvaient pas faire autrement parce que n’ayant pas accès à l’eau », a confié l’enseignante qui a souhaité ne pas être citée. Il faut dire que la chaleur rude assèche souvent les puits aménagés dans les villages et complique tout.
Maladies graves telles que le syndrome du choc toxique
Selon l’Organisation mondiale de la santé (Oms), la mauvaise hygiène menstruelle (accès au matériau de protection de qualité, aux toilettes et à l’eau propres) expose les femmes à des infections urinaires, reproductives, vaginales, aux irritations, et même aux maladies graves telles que le syndrome du choc toxique. Elle est aussi une cause de l’abandon des classes par des adolescentes.
En 2016, la Banque mondiale publiait un article pour soutenir que l’amélioration de l’hygiène menstruelle peut garantir l’autonomisation sociale de la femme et contribuer à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) 4, 5 et 6 relatifs respectivement à l’éducation de qualité, à l’égalité de sexe, à l’accès à l’eau propre et à l’assainissement. Un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation la science et la culture (UNESCO) estime qu’en Afrique subsaharienne, une fille sur 10 ne va pas à l’école pendant son cycle menstruel. Environ 20% du temps scolaire perdu en une année.
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