Le terrain reste un des biens souvent perdus dès la perte du conjoint, alors que les femmes sont les plus affectées par le changement climatique. Par Cérès Belinga
Le terrain reste un des biens souvent perdus dès la perte du conjoint, alors que les femmes sont les plus affectées par le changement climatique. Par Cérès Belinga
Madeleine B. était loin de s’imaginer qu’elle serait réfugiée après le décès de son partenaire. Elle qui n’avait aucun souci de terre du vivant de ce dernier. La travailleuse acharnée qui vivait décemment du fruit de la terre qu’elle savait bien dompter avec ses bras a, en quelques jours seulement, a perdu ses cultures, détruites par un cousin de son mari. Ce dernier l’a subitement accusée d’avoir occupé la parcelle de son épouse.
La veuve a tout perdu ; elle s’est transformée en mendiante dans son propre village. Obligée de recommencer à zéro. Elle devait en même temps chercher les moyens de survie et envoyer ses quatre enfants à l‘école. Elle va donc se livrer à la débauche.
Ce cas soulève la question de l’accès à la terre devenue de plus en plus un casse-tête dans les villages. Et elle prend plus d’ampleur pour certaines couches vulnérables que sont les femmes, les veuves, les peuples autochtones.
Le mal est encore profond dans les villages riverains des agro-industries. Les cris du trio Sidonie Essomba du village Mbede dans la l’arrondissement de Lokoundje, région du Sud, Marie Noëlle Etonde de Souza, dans le département du Moungo, à 30 kilomètres de Douala, région du Littoral et Marie Bokally Matsinde épse Zeh de Niété dans l’Océan, région du Sud, vont grandissant pour l’accès à leurs terres, occupées par des agro-industriels. « Nous voulons voir les agro-industries libérer « les espaces vitaux » pour nos activités », scandaient-elles. Elles clament être en manque d’espace pour mener leurs activités, principalement l’agriculture dont elles tirent l’essentiel de leurs revenus.
Les cultures à grande échelle de l’hévéa, du palmier à huile, entre autres, d’importantes surfaces leur ont été « arrachées » et continuent même de l’être au profit des promoteurs de ces plantations, sans compensation et en violation des clauses de départ. Les promoteurs de l’agro-industrie auxquels il est difficile d’accéder n’ont pas libéré les six kilomètres d’espace vital aux riverains pour leurs cultures, comme initialement prévu. Les populations de Souza qui attendent toujours de cette entreprise la libération d’un espace de 20 000 hectares tel que le stipule le « cahier de charges » subissent des abus divers, selon Marie Noëlle Etonde qui soupçonne les autorités traditionnelles d’être parfois de mèche. « N’ayant plus de terres pour cultiver, des femmes sont obligées de traverser les installations de cette agro-industrie pour aller très loin cueillir les feuilles d’okok (Gnetum africanum, de son nom scientifique (Ndlr) ».
Elle relève que faute de terres, elle et ses sœurs, parce que remuant le même sol chaque année, font face l’infertilité et aux attaques des cultures. « Lorsqu’on plante deux hectares de manioc, il arrive qu’un hectare entier pourrisse », se plaint-elle.
La situation n’est guère reluisante à Souza. « Nous ne faisons plus d’aussi grands rendements qu’avant. Nos cultures pourrissent », se lamente Marie Noëlle Etonde. Riveraine d’une plantation de palmier à huile présente là-bas depuis 1974.
Comme la plupart des populations riveraines des agro-industries, les trois dames clament que leurs eaux sont affectées par les produits (pesticides) utilisés par exploitations agricoles. « Nos eaux sont polluées, nos terres dégradées. Nous nous disons que ce sont les engrais déversés par ces agro-industries qui sont à l’origine de tout cela », suspecte Marie Noëlle Etonde.
Accès aux soins de santé
Des déclarations régulièrement entendues dans l’opinion mais qu’aucune autorité compétente en la matière ne songe infirmer ou affirmer. Les résultats des prélèvements des entités comme le Centre pour l’environnement et le développement sont en cours de diffusion.
L’arrivée de Camvert à Niété suscite tout de même quelques espoirs parce qu’à en croire Marie Bokally Matsinde épse Zeh, cette entreprise essaie de coopérer avec les populations. Cependant, il se pose encore le problème de leur accès aux soins de santé. « Quand l’un des nôtres tombe malade, nous sommes obligés de parcourir 18 kilomètres pour trouver un hôpital à Kribi. Et pourtant l’agro-industrie qui est installée chez nous dispose d’un centre de santé pour ses employés », se désole-t-elle.
Des déclarations restées sans aucune réaction des entreprises incriminées qui ont gardé le silence.
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